Voici la suite de la vie d’une femme, celle d’Alix Angélina METIVIER. La première partie de l’article avait permis d’aborder sa jeunesse, sa scolarité et son adolescence.
Son mariage
C’est l’année d’après qu’Alix Angélina se marie. Elle épouse Fernand BODIN, tonnelier, le 21 novembre 1905. Le mariage est célébré à la mairie de Rioux. Lui est âgé de 29 ans et elle de 25 ans. Ils viennent tous les deux de familles de cultivateurs propriétaires de villages voisins. Ils n’ont pas fait de contrat de mariage, c’est donc la communauté de biens qui s’applique pour eux.
Les témoins du côté de l’époux sont deux personnes de confiance, que nous retrouverons plus tard : Eugène GALLIER, son beau-frère, ainsi qu’Eugène MAGUIER, un de ses oncles. Alix, quant à elle, choisit comme témoins son frère Timoléon et un de ses cousins, Guillaume VERDON, de Royan.
Des projets professionnels et une vie de famille
Le couple s’installe dans un premier temps à Rioux, au lieu-dit Verderou, dans une ferme à quelques mètres de Chez Coutant, où habite Armand BODIN, le père de Fernand. Ce dernier y installe son atelier de tonnelier, et travaille à son compte. Ils y sont recensés tous les deux en 1906 :
Un premier enfant dans la famille
Une première naissance arrive dans cette famille. Alix donne la vie à la petite Marie-Anne BODIN, le 31 Aout à 13 heures au domicile familial au Verderou. On retrouve de nouveau Eugène MAGUIER, qui vient déclarer la naissance de l’enfant à la mairie, le 2 septembre, accompagné d’un autre propriétaire du village, René MEIGNIER.
Le projet d’une vie
Les projets vont bon train pour Alix et Fernand, puisque deux ans après, en 1909, ils décident d’acquérir l’épicerie-mercerie du village voisin de Saint-Simon-de-Pellouaille, afin de s’y installer, lui comme tonnelier, elle comme épicière. Un contrat de vente est conclu avec les héritiers de la famille SALLE, en Avril 1909, chez le notaire, maître RENAUD, à Tesson, en vue de la cession du fonds de commerce.
C’est cet article, nous dévoile des pistes de recherches aux Archives Départementales.
L’acte de vente est passé en avril 1909 chez Maître RENAUD à Tesson. Grâce à l’inventaire en ligne des Archives Départementales de la Charente-Maritime, j’ai pu obtenir la cote qui m’intéresse dans les minutes notariales. Ma prochaine visite dans ce dépôt d’archive devrait me permettre de récupérer de document, sous la cote 3E100/211.
Des années heureuses à Saint-Simon
D’une ferme au Verderou, au beau milieu de la campagne saintongeaise, la famille part s’installer dans un commerce, dans le bourg de Saint-Simon-de-Pellouaille. Cela a dû être un sacré changement de vie pour eux ! Un enfant, un commerce, Alix et Fernand ne manquent pas de défis depuis leur mariage quatre ans plus tôt.
La famille s’épanouit dans sa nouvelle vie, au contact des villageois et de la clientèle. Le foyer est complété par Zélida GRILLET, la mère d’Alix qui, à 73 ans, n’a plus tous ses moyens pour continuer de vivre seule. Peut-être aide-t-elle au commerce ou à l’éducation de la petite Marie-Anne, qui a déjà 4 ans en 1911.
Je ne suis pas tout à fait sûr de moi, mais il y a de fortes chances pour que le commerce qui apparait sur la droite de cette photo, soit celui où Alix tenait son épicerie-mercerie. Nous sommes au croisement de la route de Saint-Simon et de la rue de Bénigousse. Le photographe, dos à l’église, est orienté plein nord. La photo doit dater des années 1940, mais le centre du village n’a que très peu changé durant ces années. Je garde cette hypothèse de côté et irai la vérifier aux Archives Départementales.
L’acte de vente du fonds de commerce, précédemment cité, va peut-être nous révéler un numéro de parcelle, que je pourrai recouper avec le cadastre de la commune de Saint-Simon-De-Pellouaille et ainsi déterminer si ce commerce est bien le bon. Le cadastre Napoléonien indique la parcelle n°405. Je n’aurai qu’à comparer. Ces recherches sont à faire en série P. Beaucoup de dépôts d’archives ont déjà numérisé leurs matrices cadastrales !
La naissance de Blanche Marie Madeleine
La vie est belle à Saint-Simon-de-Pellouaille. Et puisqu’un un bonheur n’arrive jamais seul, Alix tombe de nouveau enceinte, à la fin de l’année 1911. La petite Blanche Marie Madeleine nait le dimanche 21 juillet 1912, à 18 heures, au domicile de la famille. Il s’agit de mon arrière-grand-mère, que l’on a toujours appelée « Grand-Mère Madeleine ». La voici, à l’âge de dix-huit mois:
Alix a maintenant trente-deux ans, un mari aimant, deux jolies filles à élever, et un commerce à tenir. Que demander de plus ? Malgré une arrivée tardive dans sa famille et la séparation de ses parents alors qu’elle n’était qu’une enfant, la montpelliéraine a néanmoins réussi à tirer son épingle du jeu en inversant un destin pas forcément bien embarqué.
Voici la seule photographie d’Alix Angélina METIVIER, qui soit parvenue jusqu’à nous. Un trésor de famille.
En juin 1914, tout bascule
Une vie de famille brisée
La vie peut, certes, offrir de très belles choses, mais tout peut aussi très rapidement basculer. Alix Angélina décède dans la nuit du 18 au 19 juin 1914, à quatre heures du matin, dans sa maison. Elle n’a alors que trente-trois ans et laisse derrière elle deux filles de sept et deux ans ainsi qu’un mari désemparé. Fernand BODIN son époux, et Raphaël GUIGNER, son beau-frère se présentent à la mairie du village pour déclarer son décès.
Je ne connais pas encore les causes de son décès. J’ai bien peur que cette question soit à ranger dans le tiroir des sujets sans réponse qui hantent le généalogiste.
Deux semaines après le décès d’Alix, Fernand BODIN se présente de nouveau à la mairie. Il vient déclarer cette fois-ci le décès de sa belle-mère, Zélida GRILLET, le 5 juillet 1914. Elle vivait avec eux depuis trois ans. Les deux actes de décès, de la fille et la mère, se trouvent sur la même page du registre des décès de la commune. Cela m’a glacé le sang quand je l’ai découvert, à la mairie de Saint-Simon, un jour de mars 2021.
C’est ainsi que la vie de toute la famille bascule. Fernand, maintenant veuf, n’est pas en mesure de s’occuper à la fois de son épicerie, son atelier de tonnelier et de l’éducation de ses deux filles, qui sont encore petites.
Une famille séparée
Les deux sœurs sont donc séparées, et élevées dans deux foyers différents. Marie-Anne, l’aînée, part vivre chez Eugène MAGUIER, l’oncle de Fernand, qui vit non loin de là, à Rioux. On la retrouve, après la Première Guerre mondiale, en 1921, dans le fichier de recensement. Elle a alors 14 ans :
Quant à Blanche Marie Madeleine, à peine deux ans, elle va partir près de la côte atlantique, dans le village de Meschers-sur-Gironde, distant de vingt-huit kilomètres. Son oncle Eugène GALLIER et sa tante Amélie BODIN vont l’élever chez eux, au hameau des Trois Journaux. Les liens qui unissent les deux sœurs vont très vite se dénouer, ce qui aura un impact dans leur vie future. Elles ne se fréquenteront que très peu par la suite, même une fois adultes.
Cette décision de séparer les deux sœurs n’a pas dû être facile à prendre. Pour en savoir plus sur les raisons de ces placements, je vais devoir creuser dans les archives de la Justice de Paix du canton de Gémozac.
Un conseil de famille a dû avoir lieu afin de nommer un ou des tuteurs et un subrogé tuteur pour Marie-Anne et Madeleine. Les conseils de famille peuvent être classés en série U des Archives Départementales.
Fernand BODIN, veuf et père des deux filles, se retrouve, quant à lui, seul, à Saint-Simon pendant plusieurs années. Il continue son activité de tonnelier.
La vente de l’épicerie-mercerie
L’épicerie est revendue en novembre 1917, à Ismaël FABVRE et Marie Zélia GOUINAUD, de Villars-en-Pons, qui reprennent le fonds de commerce du bourg. Fernand BODIN signe l’acte de vente chez le notaire de Tesson, Maitre Martel BOTTON.
Je ne suis pas sûr que l’étude notariale de Tesson ait été versé ses archives aux Archives Départementales de la Charente-Maritime. J’irai vérifier pour obtenir l’acte de vente et donc éventuellement d’autres renseignements sur les propriétaires et le contexte de la vente.
Une nouvelle vie de famille pour Fernand
Fernand se remarie le 10 juillet 1921, à Saint Simon de Pellouaille, avec Laure ROY, veuve DAUDET. Tous deux partent s’installer au hameau des Moreaux. Fernand y déménage notamment son atelier de tonnellerie. Un fils, Jean, naîtra de ce couple, en mai 1922.
Ce dernier se marie à Cozes en 1948. Son père et ses deux demi-sœurs sont présents. A cette occasion, une photographie est prise devant la porte de l’église. Il s’agit de la seule photo, en ma possession, sur laquelle apparaissent Fernand BODIN et ses deux filles Marie-Anne et Madeleine.
La disparition d’Alix METIVIER a été un choc pour beaucoup de monde. Son mari, bien entendu, pour qui la vie n’a plus été la même ensuite. Le destin de la famille a totalement basculé, avec la revente du commerce, et la séparation des deux filles. Mais c’est aussi tout un village qui a été touché par la mort de leur commerçante.
Marie-Anne et Madeleine n’ont plus jamais eu la même vie après le décès de leur mère. Adieu maman, adieu le bourg de Saint-Simon, adieu la vie de famille traditionnelle. Les deux sœurs n’ont plus jamais été aussi proches. Comme deux sœurs sans histoires pourraient l’être.
Cependant, les descendants sont là, pour reprendre contact, et échanger ! C’est ainsi que j’ai pu entrer en contact avec une petite fille de Marie Anne BODIN. La généalogie rapproche et rassemble. Elle nous enrichit d’histoire familiale.
Un nouvel article sera rédigé, lorsque j’aurai exploré les pistes de recherche de ma liste mémo, aux Archives Départementales de la Charente-Maritime.
Cet article est rédigé dans le cadre des ateliers blog de CLG Formation-Recherches. Le thème du mois de mars est : « une femme »
Ces deux articles sur la vie d’Alix sont passionnants, malgré sa fin prématurée.
J’espère que tu pourras retrouver tous les documents que tu souhaites aux AD pour compléter son histoire. Hâte de le savoir
Je vais certainement passer aux AD17 à la fin Avril, il y aura bien sûr un article qui racontera mes trouvailles, si il y en a. Merci pour ton commentaire!
Bravo et merci pour tout ce travail fourni, vraiment très émouvant !
Une arrière petite fille.
Merci Brigitte
Triste et belle histoire, qui ne touche d’autant plus que j’ai des ancêtres à Rioux.